En 2013, ce cadre originaire de Franceville, le chef-lieu de la province du Haut-Ogooué (sud-est), fut arrêtés et placé en garde à vue, en compagnie de son acolyte Brice Laccruche Alihanga, pour détournement des fonds. Il avait été ensuite envoyé au mitard, avant de recouvrer la liberté et d’être nommé au gouvernement par son comparse, resté en liberté. Sept ans plus tard, l’histoire semble bégayer.
Jonas MOULENDA
RAREMENT une destinée individuelle se sera aussi étroitement confondue avec la gabégie et le devenir économique d’un pays. L’ancien ministre de transport, Justin Ndounangoye, a un fatum on ne peut plus particulier.
Ce jeune cadre aux fausses apparences d’un innocent passe sa vie entre les milieux huppés et la prison. De fait, son destin et celui de Brice Laccruche Alihanga semblent intimement liés. Les deux hommes ont commencé leurs manoeuvres mafieuses depuis 2013.
A l’époque, Brice Laccruche Alihanga était Président-directeur général et Justin Ndounangoye directeur financier de l’entreprise Soco BTP, rachetée par la Hestia, une filiale du groupe BGFIbank.
Œuvre d’un Yougoslave, Radunovic Mombo, qui avait participé entre 1977 et 1978 à la construction des routes de la capitale gabonaise dans le cadre de l’organisation du Sommet de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) de Libreville, Soco BTP a été vendue, son promoteur devenu octogénaire sentant sur les épaules le poids de l’âge.
Son immunité parlementaire a été élevée ce jeudi soir.
Reprise par la filiale de BGFIbank, la direction de l’entreprise avait été confiée à Laccruche Alihanga. La fille du Yougoslave, mandatée pour superviser et accompagner l’adaptation des nouveaux acquéreurs, a fini par faire une dépression du fait des pressions exercées sur elle par les repreneurs de l’entreprise, au point qu’elle a dû quitter le Gabon pour se faire soigner à l’étranger.
Brice Laccruche Alihanga avait fait sortir Ndounangoye pour reconstituer son gang
En son absence, les choses se sont accélérées. Prétextant des difficultés et des promesses de marchés, le président-directeur général, Laccruche Alihanga, a réussi à se faire prêter une somme de 3 milliards de francs CFA pour relancer la boîte. Fort des dérapages et des difficultés dans lesquels s’empêtrait l’entreprise nouvellement achetée, devant le climat délétère qui y avait également cours, Henri Claude Oyima, le président du groupe BGFI, a voulu comprendre ce qui se passait.
C’est ainsi qu’un audit a été réalisé par le cabinet PricewaterhouseCoopers. Il a révélé de nombreuses dysfonctionnements et des malversations. Le cabinet commis n’a trouvé nulle part la trace des 3 milliards de francs CFA pris chez le vieux Yougoslave. Pis, l’audit à révélé que tout cela aurait fait perdre une somme globale de 9 milliards à Soco BTP.
Pas satisfait de ces résultats, le patron de BGFI a engagé un nouvel audit auprès du cabinet Deloitte. Les résultats furent les mêmes. Toute chose qui a conduit le Président de BGFI à porter plainte contre ses détrousseurs qui n’étaient autre que ses protégés Brice Laccruche Alihanga, Justin Ndounangoye et un Alime Mamadou, directeur général de SOCO BTP.
Lors d’un interrogatoire musclé après leur arrestation, les trois mafiosos avaient finalement avoué leur crime économique. Compte tenu de la gravité des faits, ils avaient été placés en garde à vue. Au terme de l’enquête préliminaire, ils avaient été présentés devant le parquet de la République. Seuls Justin Ndounangoye et Alime Mamadou avaient été placés en détention préventive à la prison centrale de Libreville.
Brice Laccruche Alihanga, lui, a réussi à se tirer d’affaire grâce à Maixant Accrombessi. Comme si le crime économique commis était une prouesse, il a été catapulté d’abord directeur général de la compagnie de navigation intérieure (CNI) puis directeur de cabinet du président par défaut du Gabon.
Résolu à reconstituer son gang financier, il a pesé de tout son poids pour sortir de la prison ses compères Justin Ndounangoye et Alime Mamadou. Tels des singes qui tombent d’un arbre et qui reprennent à jouer s’ils ne blessent pas, Laccruche Alihanga et Ndounangoye – qu’il a fait nommer au gouvernement – ont renoué avec les détournements des fonds publics.
Son avenir se jouera bientôt devant une cour criminelle
A la faveur de l’opération Scorpion, déclenchée par Ali Bongo, devenu brusquement lucide après l’accident vasculaire cérébral dont il a été victime, Brice Laccruche Alihanga a été arrêté et placé en détention préventive à la prison centrale de Libreville pour détournement des fonds publics. Son acolyte Justin Ndounangoye est également en route pour la prison.
Après la levée de son immunité parlementaire, ce jeudi soir, il ira retrouver ses amis à la prison centrale de Libreville, la semaine prochaine pour détournement des fonds. C’est d’ailleurs conscient des risques d’une nouvelle incarcération qu’il a moult fois tenté de fuir le Gabon. Malheureusement, il en a été empêché par la gendarmerie nationale qui l’avait à l’oeil.
Tout porte à croire que Justin Ndounangoye était sorti de a prison pour entrer au gouvernement, faire une autre grosse frappe avant de retourner en milieu carcéral. Qui va encore le tirer d’affaire, son sauveur étant déjà au gnouf ? Triste destin pour ce jeune cadre dont l’avenir se jouera bientôt devant une cour criminelle !
