Jonas MOULENDA
C’EST probablement l’une des journées les plus angoissantes pour le président sud-africain, Jacob Zuma. Ce mardi, le parlement de son pays votera une motion de défiance à son encontre, à la suite de plusieurs affaires de corruption.
L’avenir politique du chef d’Etat sud-africain reste donc tributaire de la clémence du parlement. Mais quel que soit le résultat du vote, son avenir s’inscrira en pointillés. Le vote prévu ce mardi se fera à bulletin secret. Il intervient à la suite de la requête introduite par l’opposition qui espère glaner des voix dans les rangs du Congrès national africain (ANC), au pouvoir.
Le nombre de parlementaires souhaitant le départ de Jacob Zuma va crescendo ces derniers temps en Afrique du Sud. Certains députés de son parti, visiblement agacés par ses scandales de corruption répétés, pourraient voter la motion de défiance. Mais de crainte d’être frappés d’ostracisme au sein du parti, ils ne peuvent pas afficher clairement leur position.
D’où le recours au bulletin secret. Si la motion est votée, le président Jacob Zuma et tout son gouvernement démissionneront immédiatement, conformément à la Constitution du pays. La transition serait assurée pendant une période de trente jours par la présidente de l’Assemblée nationale, Baleka Mbete.
Cette dernière ne cache pas ses ambitions présidentielles. La ligue des femmes de l’ANC l’a écartée au profit de Nkozasana Dlamini-Zuma, candidate favorite du président Jacob Zuma. La ligue des femmes de l’ANC a pris tout le monde de cours en jetant son dévolu sur Nkozasana Dlamini-Zuma qu’elle juge la seule candidate capable de prendre les rênes du pays.
A l’allure où vont les choses, ce vote tant attendu ouvrira incontestablement une période d’incertitudes pour la nation arc-en-ciel.
DIRIGEANT CORROMPU. Certains analystes prévoient même de graves dissensions au sein de l’ANC dont la présidence sera assurée jusqu’aux élections de décembre 2017 par Jacob Zuma, même s’il venait à être destitué par le parlement. D’aucuns se demandent si l’actuel président sud-africain ne sera pas tenté de se représenter à la tête du parti. Il bénéficie encore des soutiens de taille au sein de l’ANC.
Le vote des parlementaires sud-africain ce lundi s’apparente à un couteau à double tranchant. S’ils décidaient de maintenir Jacob Zuma au pouvoir, le parti pourrait essuyer une cinglante défaite aux élections à venir. Les députés du parti donneraient l’impression de vouloir maintenir à tout prix un dirigeant corrompu, accusé d’avoir vendu l’Afrique du Sud à une famille étrangère, à savoir la famille Gupta, d’origine indienne, et qui a récemment été naturalisée sud-africaine.
La litanie de scandales autour du clan Zuma ne date pas d’aujourd’hui, mais les députés se limitaient à s’en offusquer in petto, de peur de perdre leurs privilèges. Le parti respectait également la tradition consistant à laver le linge sale en famille. Certains députés espéraient que le président démissionnerait suite aux scandales survenus récemment, mais il ne l’a pas fait, comme son prédécesseur Thabo Mbeki en 2008. Il aura attendu que son sort soit décidé par les parlementaires.
Or, il a limogé son ministre des Finances, Pravin Gordhan, très apprécié pour sa probité. Son crime de lèse-majesté était de s’être montré particulièrement critique à propos des liens entretenus par la présidence et la famille Gupta. Il a été remplacé par l’ancien ministre des Affaires étrangères, lui-même un intime de cette famille.
Les manœuvres dolosives de Jacob Zuma commençaient à exaspérer de nombreux dignitaires sud-africains ayant joué un rôle pour la libération du pays. C’est le cas d’Ahmed Kathrada, meilleur ami de Nelson Mandela. Avant son décès en mars dernier, il avait expressément demandé à ce que Jacob Zuma n’assiste pas à son enterrement, alors qu’ils furent des compagnons de détention sur l’île de Robben Island.