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Outre le magot, le dictateur gabonais a octroyé des galons de complaisance aux officiers supérieurs des forces de sécurité et de défense pour qu’ils l’aident à conserver le pouvoir qu’il considère comme un bien familial. 

Jonas MOULENDA

LES pièces du difficile puzzle que constitue le nouveau coup d’état militaro électoral planifié par le régime d’Ali Bongo se mettent progressivement en place. Le dictateur gabonais, candidat à sa propre succession, met les bouchées doubles pour conserver le pouvoir. Selon une source proche du Trésor public gabonais, le despote aurait débloqué 75 millions de F CFA au bénéfice des chefs de corps des forces de sécurité et de défense. L’objectif de cette générosité intéressée est d’amener les militaires à mettre en pratique le nouveau putsch électoral qu’il a planifié pour conserver le fauteuil présidentiel. « Le Trésor a sorti 300 Millions pour graisser les pattes aux généraux », a confié la source, précisant que ce montant est destiné aux chefs de quatre corps, qui feront ensuite une division euclidienne.

 De fait, le président gabonais, Ali Bongo Ondimba, arrivé au pouvoir en 2009 par la force, au lendemain du décès de son père, extériorise plus sa volonté d’asseoir son pouvoir par l’armée que la nécessité de la transformer en véritable  force républicaine. Les rumeurs, les fantasmes de putsch et les coupes sombres l’ont amené à prendre le taureau par les cornes ces derniers mois. C’est un secret de polichinelle : il existe au sein de l’armée gabonaise une idéologie révolutionnaire. Un engagement qui n’est pas du goût des gouvernants. De nombreux officiers supérieurs en font les frais ces dernières années.

Soupçonné de fomenter un coup d’état, le Général Ntumpa Lebani fut jeté en prison. Pourtant, il ne s’agissait que d’un réglage de feuillure et d’un règlement de comptes entre généraux. D’autres, tapis dans l’ombre, fantasment sur la possibilité de balayer le président Ali Bongo Ondimba, qu’ils accusent d’aller à rebours des intérêts du peuple et d’être accroché à la légion étrangère.

RANCOEUR. Le climat de suspicion au sein des forces armées gabonaises a fini par y créer un gros malaise. Telle une vache qui a une plaie au dos et qui craint que le corbeau s’y pose, Ali Bongo Ondimba a pris le taureau par les cornes depuis qu’il était ministre de la Défense nationale. Il s’est débarrassé des généraux comme Honoré Oléry, Ntori Longo, Odjia Néré et tutti quanti. C’est ce toilettage qui lui a permis de s’imposer à a tête de l’état après la mort de son père.

Dans les forces de sécurité et de défense, les galons se donnent désormais sur la base du népotisme.

 

Pour s’assurer un deuxième mandat en 2016, Ali Bongo Ondimba avait procédé à un autre nettoyage, après le verrouillage de l’administration électorale par le biais du ministère de l’Intérieure à la tête duquel il avait placé un inconditionnel, Pacôme Moubelet. L’histoire ayant la propension de bégayer, Ali Bongo remet ça pour l’élection présidentielle prévue le 26 août  prochain. D’après une source tapie dans les arcanes du pouvoir, tout semble prêt pour consacrer le perdant vainqueur contre la volonté populaire.

Malgré les multiples virées dans les garnisons tout au long de cette année pour graisser les pattes aux chefs corps, Ali Bongo Ondimba fait un grand plongeon au sein de l’armée, histoire de placer ses pions, capables de lui assurer le mandat de trop et de la honte contre la volonté populaire. Quitte à faire couler derechef le sang des Gabonais, comme ce fut le cas en septembre 2016.

Pour  réussir sa mission funambulesque, le despote s’est entouré des extrémistes téké, l’ethnie de ses parents adoptifs. Il a même battu le rappel des certains officiers supérieurs en seconde section, ayant bâti leur ascension dans l’armée sur la base de l’intrigue. C’est le cas du sulfureux Mali Gabriel Handjoua, du reste, connu pour sa malignité. Lorsqu’il était en fonction à la contre-ingérence, rapporte une autre source, il passait son temps à alimenter des rumeurs de faux coups d’état impliquant des officiers supérieurs. Il est à la base de la déchéance du général des corps d’armée Sockat, qu’il a accusé, à tort, d’avoir détourné les salaires des militaires gabonais en mission en République centrafricaine (RCA). Son frère d’arme se retrouve aujourd’hui en chômage technique à cause de ses affabulations.

Au ministère de la Défense nationale, le vice-amiral Mali Gabriel Handjoua travaille en étroite collaboration avec le colonel Jean-Paul Lekongo, un autre illettré qui a fait chou bas à l’école militaire du Maroc. Le premier officier supérieur cité s’est débarrassé de tous les officiers qui ne sont pas de la même province que lui. C’est ainsi que le département ministériel se retrouve aujourd’hui dirigé rien que par des membres d’une même ethnie. Même les galons ne sont désormais donnés en priorité qu’aux ressortissants de la province du Haut-Ogooué. Toute chose qui attise les rancœurs. Le malaise s’est amplifié depuis que le vice-amiral Mali Gabriel Handjoua a été rappelé au ministère de la Défense nationale.