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Le scénario n’est pas nouveau. Un chef d’Etat perd l’élection présidentielle, refuse de céder sa place et tente par tous les moyens de se maintenir au pouvoir. Le dirigeant gabonais, qui marche dans le sillage du Congolais Denis Sassou Nguesso et de l’ancien président gambien Yahya Jammeh, est atteint du syndrome de la présidence à vie. Pourtant, sa chute parait bien inévitable.

Jonas MOULENDA 

Les observateurs de la scène politique pensent que le tyran peut, à tout moment, tomber du petit nuage sur lequel il s’est niché à la suite de son hold-up militaro électoral de 2016. De fait, les grosses grappes de nimbostratus qui s’amoncèlent déjà dans le ciel gabonais sont le présage d’un avenir sombre pour le despote et son clan. Acculé de plus en plus par les syndicats, l’opposition, la société civile et la diaspora, l’imposteur est plus qu’affaibli aujourd’hui.

D’après son entourage, il semble davantage stressé par la diaspora qui représente une menace réelle pour son imposture. D’autant plus c’est dans les pays où vivent les grands décideurs de ce monde qu’elle revendique son départ. Cette peur est d’autant plus grande qu’elle intervient dans un contexte international caractérisé par l’amorce de révoltes populaires dans de nombreux pays africains et la chute progressive des dictateurs de la région.

Ali Bongo se rend compte  que la stratégie de l’essoufflement sur laquelle il comptait ne marche pas à coup sûr. Son entêtement remobilise les troupes de la contestation. Il  réalisent aussi  que ses collaborateurs qui n’ont de cesse de le rassurer du retour au calme ne sont que de piètres manœuvriers sur lesquels il ne doit pas compter pour reprendre le contrôle de la situation et conserver le pouvoir jusqu’à la fin de son mandat usurpé.

Le dictateur veut se servir de ces élections législatives pour se faire une légitimité. 

Les Gabonais, manifestement mus par une nouvelle conscience citoyenne, ne semblent pas prêts à une résignation. La mobilisation de la diaspora ces derniers jours pourrait compromettre la dynamique de rouleau compresseur diplomatique en faveur d’Ali Bongo. Il est clair que l’Elysée est informé du rejet subi par Ali Bongo, deux ans après son hold-up militaro électoral.

De nombreux analystes pensent qu’Ali Bongo ne tiendra pas debout jusqu’en 2023, année de la prochaine élection présidentielle au Gabon. Le climat social ne joue pas en sa faveur. Tous les secteurs d’emploi sont davantage atteints, avec pour conséquences des vagues de licenciements qui servent d’exutoire à des entreprises assaillies par les difficultés économiques et en proie à un malaise que les grèves et manifestations ne contribuent pas à apaiser.

Le sentiment anti-Bongo se développe au sein d’une population en butte à des difficultés économiques inextricables. Le rejet du système en place s’amplifie, nourri par le hold-up électoral, le massacre des civils qui s’en est suivi et d’une instabilité gouvernementale qui conduit à la mise en cause d’un système démocratique faussé, surplombé qu’il est par un régime dictatorial.

Le plus dur commencera après le deuxième tour des élections législatives et la formation d’un nouveau gouvernement 

La politique réactionnaire du gouvernement, marquée par la déflation salariale, la révocation de fonctionnaires pour faits de grève, renforce progressivement les liens entre les organisations politiques et syndicales. Des grèves d’ampleur pourraient spontanément sans directive confédérale. Les réactions disproportionnées du régime dictatorial ne feront pas baisser la tension. Celle-ci sera l’expression toujours vivace et tangible du rejet du pouvoir par le peuple uni dans la défense de l’intérêt général.

Après la formation d’un gouvernement, au terme du deuxième tour des élections législatives, la déception sera grande dans les rangs du Parti démocratisue gabonais (PDG), au pouvoir.  De nombreux hiérarques de cette formation politique risquent de grossir les rangs du front populaire en gestation. De nombreux événements plaident pour une synergie populaire. Enlisement de la crise, amplification des inégalités, concentration des richesses entre les mains de quelques individus, corruption et accroissement du chômage qui viendront s’ajouter au cocktail explosif déjà existant.

La crise profonde et l’inévitable situation de cessation de paiement mettront en péril les fondements d’un dictateur peu enclin à abandonner les honneurs et les prébendes. Nombre d’éléments créditent un tel schéma et tout d’abord le fait que jamais la société gabonaise n’a comme aujourd’hui offert l’image d’une union sacrée pour la défense des intérêts supérieurs de la nation. Les tentatives de division et de corruption orchestrées par le pouvoir se soldent par des échecs.

Le malaise social s’amplifie au Gabon