En 2013, ces deux mafiosos ont été arrêtés et placés en garde à vue pour détournement des fonds. Si le dernier cité a été envoyé au mitard, avant de recouvrer la liberté, le second, lui, est passé par les mailles du filet, soutenu par la présidence de la République. Le dossier reste pendant devant la justice, mais les deux présumés malfrats ont bénéficié des promotions dans la sphère décisionnelle de l’État.
Jonas MOULENDA
LE détournement des deniers publics au Gabon semble être un critère de promotion au gouvernement et dans d’autres sphères décisionnelles de l’État. Comment comprendre que des malfrats tels que Brice Laccruche Alihanga et Justin Ndounangoye, sur lesquels pèsent de forts soupçons de crime économique, se retrouvent aujourd’hui catapultés respectivement directeur de cabinet du président de la République (par défaut) et ministre des Transports ?
De toute évidence, les deux acolytes ont bénéficié de la protection des plus hautes autorités du pays. Il se susurre que c’est Maixant Accrombessi, l’ancien directeur de cabinet d’Ali Bongo, qui avait sauvé in extrémis Brice Laccruche Alihanga. « Lorsque nous l’avons arrêté et placé en garde à vue, la présidence de la République est intervenue, nous demandant de le libérer. M. Accrombessi notamment nous a demandé de le relâcher », a dénoncé un des officiers de police judiciaire chargés du dossier à l’époque.
Brice Laccruche Alihanga était Président-directeur général et Justin Ndounangoye directeur financier de l’entreprise Soco BTP, rachetée par la Hestia, une filiale du groupe BGFIbank. Œuvre d’un Yougoslave, Radunovic Mombo, qui avait participé entre 1977 et 1978 à la construction des routes de la capitale gabonaise dans le cadre de l’organisation du Sommet de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) de Libreville, Soco BTP a été vendue, son promoteur devenu octogénaire sentant sur les épaules le poids de l’âge.
Un audit a révélé un détournement de 3 milliards de F CFA
Reprise par la filiale de BGFIbank, la direction de l’entreprise avait été confiée à Laccruche Alihanga. La fille du Yougoslave, mandatée pour superviser et accompagner l’adaptation des nouveaux acquéreurs, a fini par faire une dépression du fait des pressions sur elle exercés par les repreneurs de l’entreprise, au point qu’elle a dû quitter le Gabon pour se faire soigner à l’étranger.

Bgfibank avait viré les auteurs du crime économique.
En son absence, les choses se sont accélérées. Prétextant des difficultés et des promesses de marchés, le président directeur général, Laccruche Alihanga, a réussi à se faire prêter une somme de 3 milliards de francs CFA pour relancer la boîte. Fort des dérapages et des difficultés dans lesquels s’empêtrait l’entreprise nouvellement achetée, devant le climat délétère qui y avait également cours, Henri Claude Oyima, le président du groupe BGFI, a voulu comprendre ce qui se passait.
C’est ainsi qu’un audit a été réalisé par le cabinet PricewaterhouseCoopers. Il a révélé de nombreuses dysfonctionnements et des malversations. Le cabinet commis n’a trouvé nulle part la trace des 3 milliards de francs CFA pris chez le vieux Yougoslave. Pis, l’audit à révélé que tout cela aurait fait perdre une somme globale de 9 milliards à Soco BTP.
Pas satisfait de ces résultats, le patron de BGFI a engagé un nouvel audit auprès du cabinet Deloitte. Les résultats furent les mêmes. Toute chose qui a conduit le Président de BGFI à porter plainte contre ses détrousseurs qui n’étaient autre que ses protégés Brice Laccruche Alihanga, Justin Ndounangoye et un Alime Mamadou, directeur général de SOCO BTP.
Brice Laccruche Alihanga a été par Maixant Accrombessi
Lors d’un interrogatoire musclé après leur arrestation, les trois mafiosos ont finalement avoué leur crime économique. Compte tenu de la gravité des faits, ils ont été placés en garde à vue. Au terme de l’enquête préliminaire, ils ont été présentés devant le parquet de la République. Seuls Justin Ndounangoye et Alime Mamadou ont placés en détention préventive à la prison centrale de Libreville.

Les deux mafiosi ont reconstitué leur gang.
Brice Laccruche Alihanga, lui, a réussi à se tirer d’affaire grâce à Maixant Accrombessi. Comme si le crime économique commis était une prouesse, il a été catapulté d’abord directeur général de la compagnie de navigation intérieure (CNI) puis directeur de cabinet du président par défaut du Gabon.
Résolu à reconstituer son gang financier, il a pesé de tout son poids pour sortir de la prison ses compères Justin Ndounangoye et Alime Mamadou. Tels des singes qui tombent d’un arbre et qui reprennent à jouer s’ils ne blessent pas, Laccruche Alihanga et Ndounangoye – qu’il a fait nommer au gouvernement – ont renoué avec les détournements des fonds publics. Leur mafia s’étend jusqu’à la bergerie pétrolière.
Nous y reviendrons.