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 Cette ville, située à l’extrême nord du Gabon, est à une vingtaine de kilomètres de la frontière avec le Cameroun et à cent quatre kilomètres d’Oyem, le chef-lieu de la province du Woleu-Ntem. Y accéder relève d’une véritable gageure, tant elle demeure très enclavée. Réportage. 

Sarah MELIEUM

Envoyée Spéciale

LE visiteur qui débarque pour la première fois à Minvoul, le chef-lieu du département du Haut-Ntem, est frappé par la décrépitude des bâtiments administratifs qui surplombent la ville. Celle-ci présente le décor d’un chantier abandonné. Les rares édifices publics construits au cours de cette décennie ne sont pas entretenus et commencent à tomber en ruines.

Minvoul n’a pas connu de progrès significatif. (Photos: John Maixant Obaga. )

Quant aux vieilles bâtisses, elles présentent des fissures et menacent de s’écrouler à tout moment. C’est le cas de l’ancienne brigade de gendarmerie. Datant de plusieurs décennies, est déjà atteinte par la décrépitude et n’a pas subi une cure de jouvence depuis lors. De nombreux fonctionnaires en poste en Minvoul perçoivent leur affection comme une punition. « Ici, c’est un camp de redressement. Quand on vous affecte ici, c’est qu’on vous a puni, » lâche un agent du cantonnement d’Eau et Forêt. 
S’agissant des infrastructures routières, la situation n’est guère reluisante. La principale route qui relie  Minvoul au chef-lieu de la province qu’est Oyem n’est pas recouverte de bitume et se trouve dans un piteux état. Quand il pleut dru dans la région, y circuler relève d’une véritable gageure.  « Il faut avoir un véhicule 4X4 parce que la route se transforme souvent en patinoire », explique un automobiliste rencontré au marché de Minvoul.

La route de Minvoul demeure une véritable piste d’éléphant.

C’est dans cette partie de la ville que Fatou, 37ans, a installé son commerce. Issue de la communauté Haoussa, elle vend des sandwichs, des boissons chaudes et fraîches, et des cigarettes à l’unité. « En choisissant de m’installer ici, je pensais bien gagner ma vie. Mais les clients sont rares. Les gens n’ont pas d’argent. Il n’y  pas de sociétés dans la ville », explique-t-elle. « Ici, comme dans presque tout le département du Ntem, nous sommes des laissés-pour-compte », renchérit sa copine Léa, venue lui rendre visite.
ETAT PITEUX. Selon la litanie qui revient presque dans toutes les conversations, il n’y a pas d’opportunités d’emploi dans le Haut-Ntem. Le pire est qu’il n’y a même pas d’espoir d’en trouver.  Patrick, 31 ans, a déposé une demande à la mairie mais son dossier est resté dans les tiroirs de l’administration. « Si tu n’as pas de piston, tu n’obtiens rien, »  avance  le jeune homme. Pour chercher du travail les jeunes partent pour Oyem, Bitam et  Mitzic. «  Nous  sommes entrés dans l’ère de l’émergence mais celle-ci e est passée ici sans s’arrêter », ironise  Cédric, l’ami de Patrick, qui fume un mégot de cigarette.

Le marché de Minvoul, l’un des rares lieux mouvementés de la ville.

Dans certains villages, les écoles n’existent que de nom. Les enfants suivent les cours à même le sol, faute des table-bancs. C’est le cas, par exemple, de Mibang où l’école menace même de s’écrouler au moindre orage. L’état piteux dans lequel se trouve l’école de ce village ne semble pas émouvoir les décideurs. «  Nos enfants apprennent dans des conditions particulièrement difficiles. Ceux qui ont les moyens sont obligés d’envoyer leur progéniture à Oyem »,  fait observer un riverain, visiblement désappointé.

Ce qui fait office d’école dans les bourgades environnantes